L’objectif de cet article est de démontrer en quoi l’accès aux stages est un exemple fondamental des inégalités d’accès à l’éducation et ce, même dans un Etat avec un Indice de Développement Humain élevé comme la France.
L’accès à l’éducation s’améliore, c’est un fait incontestable comme le montre ce tableau de l’UNICEF.
C’est positif parce que cet accès est essentiel pour développer l’esprit critique et s’intégrer dans la société à travers l’emploi, d’autant plus que droit à l’éducation est consacré comme droit fondamental par l’UNESCO. Néanmoins, celle-ci consacre aussi une égalité d’accès à l’éducationet ce, peu importe le sexe ou la classe sociale. Un concept important puisque l’objectif est loin d’être atteint, que l’on vive sur le continent africain, ou bien en Europe, même s’il faut mesurer la situation sur des plans différents.
En France, le taux de scolarisation est élevé, il est de 99% pour les enfants scolarisés en primaire et descend à 95% à l’âge de 16 ans. Comparé à d’autres pays présentés dans le premier tableau, cela semble être un excellent résultat. Pourtant, ce taux n’atteint pas 100%, ce qui est dommageable. Il existe aussi de nombreuses inégalités que Marie DURU-BELLAT détaille dans un rapport.
L’inégalité qui nous intéresse dans ce rapport, c’est l’influence des inégalités sociales sur l’éducation, éducation qui ne doit pas seulement exister, mais qui doit être de bonne qualité et accessible à tous. Marie DURU-BELLAT a étudié l’ensemble de la scolarité en France, jusqu’aux études supérieures et démontre qu’un jeune issu d’une classe sociale favorisée a tendance à mieux réussir ses études qu’un jeune qui vit dans une famille aux moyens limités. C’est le cas par exemple avec l’accès à des écoles prestigieuses, dont les aides sont souvent insuffisantes pour des familles modestes, ou encore des écoles étrangères, comme c’est le cas pour les universités américaines. Une nuance est à apporter pour les écoles de l’Etat, l’ENA et l’ENM, qui offrent des formations rémunérées.
Toutefois, l’auteure du rapport ne s’intéresse pas aux autres conséquences liées aux inégalités sociales. C’est notamment le cas avec les stages. D’après le dictionnaire Larousse, un stage fait partie intégrante d’une formation, formation qui se révèle faire partie de l’éducation.
Il est possible d’en déduire, par un raisonnement logique, que l’égalité d’accès à l’éducation, est une égalité d’accès à la formation, donc aux stages.
Le problème qui se pose, c’est qu’en France, l’égalité d’accès aux stages est très controversée.
En effet, de nombreux stages ne peuvent être obtenus qu’en passant par des personnes que l’on connaît, et les témoignages se multiplient à ce sujet. Néanmoins, ce point est nuancé par le développement des réseaux et l’engagement des universités dans l’organisation de rencontres entre les étudiants et les professionnels.
Cependant, un point subsiste et ne semble pas vouloir disparaître, c’est la gratification. En effet, la gratification des stages d’une durée inférieure à deux mois est facultative. Cela signifie que lorsque des déplacements sont nécessaires, ou qu’un logement doit être trouvé pour réaliser le stage, il faut prendre en charge soit même les frais, un coût important qui exclut toutes les familles modestes. De plus, même s’il est possible de cumuler un emploi étudiant avec son cursus scolaire pour financer les stages, les statistiques montrent (document PDF à télécharger) que la réussite de ces étudiants est plus faible.
Néanmoins, depuis 2014, la loi française oblige la rémunération des stages d’une durée supérieure à deux mois. Sauf, que le montant minimum que l’employeur peut verser est de 15% du plafond de la sécurité sociale, soit 3,6€ de l’heure au 1er Janvier 2016, ce qui est presque trois fois moins que le revenu minimal en France (9,76€).
Le plus inquiétant, c’est que les services publics de l’Etat, qui devraient être des modèles et devraient œuvrer à l’égalité d’accès à l’éducation, utilisent le montant minimal possible. C’est le cas de la Cour de cassation, juridiction suprême de l’ordre judiciaire en France, par exemple. Or, la Cour de cassation est située à Paris, ce qui signifie que les étudiants qui n’habitent pas à Paris et ne peuvent engager de frais ne peuvent réaliser ce stage, Paris étant la quatrième ville la plus chère au monde quant au logement.
Enfin, pour noircir le tableau, il faut pointer la non rémunération de certains stages prestigieux, comme ceux aux Nations Unies et dans certaines de ses institutions spécialisées comme l’UNESCO ou encore la Cour Pénale Internationale, alors que ce sont ces mêmes organisations internationales qui défendent l’égalité d’accès à l’éducation tout en étant les premières à participer à ces inégalités. C’est une situation très ironique, mais surtout un constat alarmiste.
Par exemple, un stage au siège des Nations Unies à New-York est très coûteux et seuls des étudiants qui sont issus de familles favorisées peuvent réaliser ce stage et ce, peu importe les compétences.
Aujourd’hui, parmi ces organisations internationales, seul le Fond Monétaire Internationalrémunère les stagiaires avec un salaire compétitif.
Combien de temps faut-il pour que ces organisations, qui arguent faire tout ce qui est possible pour mettre en place une égalité d’accès à l’éducation, respectent leurs propres engagements ?
Issu d’une famille modeste, je suis obligé de me résigner à candidater à certains stages, ou d’en refuser d’autres parce que je ne peux pas engager des frais. Je fais face à ces inégalités d’accès à l’éducation tous les jours, ne possédant aucune mobilité étudiante, parce qu’étudier dans une autre ville est trop onéreux.
Je ressens parfois comme une injustice, comme une impression de voir mon avenir m’échapper. Mais je ne perds pas espoir, et je redoublerai d’efforts pour réaliser mon rêve : travailler aux Nations Unies et combattre ces mêmes inégalités qui me ferment certaines portes afin qu’elles ne soient plus jamais préjudiciables à d’autres.